La Tribune de la Baie des Crocs

The Uncharted Seas

Spartan Games


10/06/2016

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REVUE DU JEU

François Bruntz
The Uncharted Seas


LES MERS INEXPLOREES
The Uncharted Seas (TUS pour la communauté francophone et UCS pour la communauté anglophone) est un jeu de bataille navale fantastique lancé par Spartan Games en 2009 et abandonné en 2015.

Les peuples du Vieux Monde ont découvert de nouvelles contrées à l'ouest et ont entamé leur colonisation. Mais ces territoires inconnus sont dominés par les mystérieux Seigneurs Dragons qui dominèrent le monde dans les temps anciens. Hommes de l'Empire, Clans Orques, Elfes et Nains arment des flottes de guerre pour conquérir le nouveau monde, ils doivent tout autant faire face aux Seigneurs Dragons et à leurs alliés qu'à d'autres nations soucieuses de préserver leurs intérêts...

La Tribune de la Baie des Crocs vous propose une revue complète du jeu...

Livre des règles et figurines...

LE LIVRE DES REGLES
Les règles du jeu ont été distribuées sous la forme d'un livre des règles cartonné et d'un fichier PDF gratuit (toujours téléchargeable sur le site officiel de Spartan Games).

La version papier des règles est de bonne qualité. Papier glacé, tout en couleur, mise en page soignée avec nombreux schémas et photos de figurines en action. On y trouve également les listes d'armée et l'historique de toutes les flottes du jeu.

La version PDF reprend l'ensemble des règles du jeu à l'exception des listes d'armée (cependant disponibles en téléchargement gratuit sur le site officiel) et quelques autres points tels que les quelques scénarios de base. On regrettera l'absence de photos mettant en scène les figurines, les illustrations sont en effet relativement peu nombreuses et mettent surtout en avant des concepts 3D en noir et blanc un peu tristes.

Les règles de TUS ont connu trois versions au cours de leur vie :
  • La V1 est celle qui a lancé le jeu en 2009
  • La V2 (Second Edition), éditée en 2010 et était en réalité une v1.1 des règles
  • La V3 (Hardback Edition), dernière version éditée en 2012 et qui était quant à elle une véritable seconde édition malgré les annonces faites par SG qui la présentait comme une simple mise à jour de la mise en page des règles.

Avant d'aller plus loin dans la description des règles, il est nécessaire de souligner qu'elles ne sont pas écrites d'une façon très précise et qu'au final elles manquent de clarté : les auteurs se répètent, des points de règle sont obscurs, d'autres ne sont indiqués que dans les exemples ou schémas explicatifs... 
Fort heureusement les règles sont simples et intuitives ce qui permet de facilement outrepasser ce problème. On peut cependant tout de même regretter que ce problème persiste dans cette troisième édition des règles alors que Spartan Games a eu tout le temps nécessaire pour s'améliorer.

A noter qu'il n'existe pas de version française du jeu, Spartan Games n'ayant jamais édité de traduction et n'ayant pas non plus autorisé la diffusion des travaux faits par les fans.


LES GRANDS CONCEPTS
A The Uncharted Seas, les navires sont regroupés en escadrons de taille variable selon leur classe. Ainsi, les cuirassés, les plus gros navires du jeu, agissent en solitaire mais les Croiseurs, les Destroyers et les Frégates sont généralement regroupés en formation de 2 à 6 unités pouvant inclure des unités spéciales. 

Chaque navire possède des caractéristiques bien définies : sa Capacité de Dommages, sa Capacité de Dommages Critiques, son mouvement (en pouces), ses Points de Structure, ses Points d'Equipage, sa capacité d'Eperonnage ainsi que le détail de son armement (emplacement, différentes puissances de feu selon la portée, etc.). 

Les navires sont divisés en 3 classes : les Frégate et Destroyers (petits, agiles et plus difficiles à toucher que les autres), les Croiseurs (de taille moyenne, résistants et possédant une bonne puissance de feu) et les Cuirassés (de véritables bastions flottants). Mais de nombreuses variantes sont également disponibles (croiseurs lourds, cuirassés de type navire amiral, etc). On peut également ajouter à la liste les sous-marins, les unités volantes et les fortifications.


Les fiches de statistiques sont austères et il leur manque une illustration
du navire concerné pour les rendre vraiment utiles en cours de jeu

Un tour de jeu débute par la Phase d'Initiative où chaque joueur lance 1d6 (sans modificateur) : le vainqueur peut choisir celui qui débutera le tour. C'est durant cette phase que la direction du vent est susceptible de changer.

Pendant la Phase de Mouvement et de Combat, les joueurs activeront à tour de rôle leurs escadrons.
Le mouvement se fait le plus simplement du monde.
Tout d'abord le vent est géré à l'aide d'un gabarit qui indique rapidement si un navire à voiles est contre le vent ou pas : si c'est le cas, il n'avancera plus qu'à vitesse réduite (divisée par 2), dans tous les autres cas, il se déplacera de son mouvement normal. On notera qu'au final seulement la moitié des flottes de jeu disponibles est réellement sensible au vent ce qui peut parfois rendre ce dernier totalement neutre en cours de partie.
La gestion des virages est quant à elle aussi simple et  très proche de celle de Man O'War, le jeu de bataille navale fantastique de Games Workshop. Un gabarit spécial est utilisé pour chaque classe de navire et permet d'effectuer les virages sans se perdre en calculs et autres vérifications au compas. Le seul point négatif de ce système est qu'il est parfois difficile à utiliser lorsque les navires sont proches les uns des autres et qu'il n'est plus possible de poser le gabarit à côté de la figurine que l'on veut déplacer...
Des gabarits étaient fournis avec chaque "starter set" (boite de base permettant de déployer une petite flotte jouable pour chaque faction) mais la version PDF des règles permet également de les imprimer. Certains fabricants d'accessoires tels que Litko Aerosystems proposent encore aujourd'hui des gabarits en plastique.

Un navire devra obligatoirement effectuer un mouvement en ligne droite de 2 pouces pour représenter sa dérive si le joueur ne souhaite pas le faire manoeuvrer. Ce dernier pourra cependant jeter l'ancre mais c'est une opération à bien planifier pour ne pas se retrouver immobilisé dans une situation devenue vulnérable.

Une fois le mouvement de l'escadron effectué, il pourra combattre. On distingue plusieurs formes de combat : les éperonnages/abordages, les tirs et les abordages respectivement gérés pendant la Phase de Collision et d'Eperonnage, la Phase de Combat et la Phase d'Abordage.

Les tirs sont résolus à l'aide des gabarits de virage qui indiquent également les angles de tir d'un navire. L'utilisation du gabarit simplifie vraiment les choses et indique rapidement si un navire est hors de l'angle de tir, complètement dedans ou à mi-chemin entre les deux. La distance entre le tireur et la cible est ensuite mesurée et permet de déterminer le nombre de dés à lancer. Chaque résultat de 4 ou 5 inflige une touche, un résultat de 6 inflige 2 touches et peut être relancé (en pratique ce système du dé dit "explosif" se révèle particulièrement jouissif !). Si le nombre total de touches équivaut à la Capacité de Dommages de la cible, un point de dégât est infligé (chaque point de dégât réduit la puissance de feu du navire et si le total des points de dégât devient égal à sa Capacité de Dommages, il coule). Mais si le nombre total de touche équivaut à la Capacité de Dommages Critiques de la cible, un dégât critique est lancé sur une table spéciale et générique à l'ensemble des navires du jeu : généralement la cible va encaisser des points de dégâts supplémentaires, des incendies peuvent se déclarer, des armes peuvent être endommagées ou le navire peut carrément exploser et couler. Tout un tas d'autres petites règles permettent de pimenter le jeu : des navires d'un même escadron peuvent coordonner leurs tirs (ainsi des Frégates à puissance de feu réduite peuvent espérer inquiéter un Cuirassé), un navire touchés à l'arrière est plus vulnérable, etc.
Si jamais deux navires sont en contact, on détermine s'il y a éperonnage (dans ce cas les deux navires subissent des dégâts, la cible en subissant bien entendu plus que son agresseur mais cela rend cette technique dangereuse pour tout le monde). Puis l'abordage opposera les équipages des différents navires impliqués. Les éperonnages et les combats sont gérés à la manière des tirs. C'est simple et très rapide.

Une fois que tous les escadrons ont agi, on termine avec la Phase de Fin de Tour. On y calcule les points de victoire (pertes infligées, objectifs des scénarios), on détermine également les effets des dégâts critiques, etc.

Chaque flotte possède également un jeu de cartes spéciales permettant de représenter les sortilèges et/ou les avancées technologiques de chaque race. Si l'utilisation des cartes est optionnelle il est dommage de s'en passer car elles apportent un vrai plus aux batailles.

L'ENFER DES REGLES SPECIALES
Si les règles de base sont simples, efficaces et très amusantes, les règles spéciales sont une toute autre affaire...

Elles permettent de jouer des unités exotiques comme les unités volantes (dirigeables, dragons et autres créatures ou machines volantes), les sous-marins ou encore des créatures marines indépendantes susceptibles de jouer les trouble-fêtes (géants, serpents de mer, etc.). On y retrouve aussi des règles pour jouer des fortifications pour lesquelles Spartan Games proposait une très belle gamme de décors.

On retrouve d'excellentes idées dans ces règles comme par exemple l'utilisation de figurines-leurres pour dissimuler la véritable position d'un sous-marin en plongée malheureusement l'ensemble est peu clair et alourdi par de nombreuses et fastidieuses listes d'exceptions aux règles de base. Cette inutile complexité finit par alourdir les règles de base qui brillaient justement par leur simplicité. C'est là un vrai défaut du jeu qui aurait mérité une version supplémentaire pour le gommer.

ET TOUT LE RESTE...
Le livre des règles propose également quelques règles optionnelles de gestion de la météo ou encore de l'expérience et du moral des équipages. Des règles qui resteront le plus souvent ignorées.

Grosse déception de ce livre des règles, comme pour les précédentes éditions, on n'y trouve qu'une poignée de scénarios génériques  et pas forcément passionnants. C'est un choix plutôt étrange  pour un jeu avec figurines mais qui malheureusement semble être récurrent chez l'éditeur.


LES LISTES D'ARMEE
The Uncharted Seas met en scène pas moins de 8 races différentes, des traditionnels Nains et Orques en passant par les plus exotiques Pirates du Ciel et Ralgards.
L'historique, les navires et les règles spéciales de chaque race sont décrits dans le livre des règles en version papier et dans des fichiers PDF indépendants à télécharger.
Le principal défaut de ces documents est l'absence complète d'illustration concernant les navires ce qui rend moins facile la lecture des règles en cours de bataille. Ce problème est en voie de résolution grâce aux Guides Nautiques de la Tribune de la Baie des Crocs.
Un autre point noir des listes d'armée vient des règles de constitution d'une flotte : ces dernières sont particulièrement complexes et peu claires et elles occasionnent de nombreuses erreurs.
Dernier point regrettable, certaines règles spéciales sont inutilement longues et compliquées pour un résultat finalement peu spectaculaire. On aurait également aimé qu'elles fassent l'objet de MARS (ie de compétences spéciales génériques) afin de rassembler toutes les règles au même endroit.

UN UNIVERS PASSE PARTOUT
L'univers de The Uncharted Seas est malheureusement peu original et peu passionnant. A quelques exceptions près, l'éditeur use et abuse des stéréotypes : les Nains sont d'excellents ingénieurs, les Elfes sont rapides, les Orques sont brutaux, etc. La plupart du temps on préfèrera largement utiliser les règles et les figurines pour jouer dans d'autres univers bien plus intéressants tels que ceux de Games Workshop ou de ses concurrents.

LES FIGURINES
Les figurines et les décors produits par Spartan Games étaient en résine et en métal. La plupart des navires bénéficiaient d'une coque en résine et de voiles en métal tandis que les autres unités (dragons, géants, etc.) étaient en métal et les décors (fortins, fortifications, etc.) étaient entièrement en résine.

La vente des flottes se faisait par le biais de "starter sets" permettant de déployer une petite flotte entièrement jouable et de blisters pour compléter ses forces. Une première gamme de navires TUS était disponible au lancement du jeu mais rapidement Spartan Games a amélioré la qualité de ses figurines et a finalement effectué un relooking complet des différentes flottes à mi-vie du jeu. Ce changement a été brutal et explique en partie les difficultés du jeu à s'imposer auprès de la communauté, les vétérans ayant acheté des flottes dont le design était devenu vieillot voire carrément incompatible pour certaines flottes comme par exemple les Elfes Thaniras.


La Marine Impériale est l'une des flottes qui a le plus gagné au renouvellement de la gamme...

De manière générale les figurines TUS sont de bonne qualité et agréables à peindre. Elles sont également très grandes comparées à ce qui a pu se faire par le passé, en particulier la production Citadel pour Man O'War. Seuls les navires de la boite Dreadfleet sont de taille similaire.

TUE PAR SON PROPRE EDITEUR
Spartan Games s'est lancé sur le marché du jeu avec figurines grâce à The Uncharted Seas. Ce dernier a immédiatement eu du succès auprès des joueurs non seulement grâce à la qualité de ses règles mais aussi parce que c'était la première fois depuis Man O'War qu'on proposait aux joueurs de se lancer dans des batailles navales fantastiques.
Malheureusement l'éditeur a rapidement étouffé ce succès. Cela a commencé par des retards systématiques concernant les dates de sortie des nouveautés et par l'accumulation des mises à jour des règles. Pire encore le renouvellement surprise de la gamme de figurines, malgré une hausse significative de leur qualité, a donné un coup d'arrêt brutal au jeu, les vétérans du jeu (ceux ayant fait son succès) se sentant trahis puisqu'à la tête de flottes obsolètes et les joueurs potentiels retardant leurs achats alors que Spartan Games accumulaient les retards.
Après la trop longue mise à jour de la gamme de figurines, Spartan Games n'a jamais mis les moyens nécessaires pour relancer le jeu qui l'avait pourtant mis sur le devant de la scène. Pire encore l'éditeur a multiplié les annonces sans lendemain (livret de campagne, règles additionnelles pour jouer des débarquement de troupes ou pour renouveler le système de magie) ainsi que la mise en place de groupes de tests laissés ensuite à l'abandon.
Pour couronner le tout, alors qu'il continuait à être très actif sur ses autres jeux (Firestorm Armada et Dystopian Wars, l'éditeur a tout simplement cessé de communiquer avec les joueurs sur le forum officiel alors que de nombreuses questions se posaient sur l'avenir du jeu.
En 2013, Spartan Games annonçait la fin de la distribution du jeu en magasin. The Uncharted Seas restait cependant disponible dans la boutique en ligne de l'éditeur.
C'est en 2015 que la mort du jeu fut officialisée avec l'arrêt complet de la production de figurines. Cependant l'éditeur continue à souffler le chaud et le froid en multipliant les annonces concernant une possible nouvelle version du jeu dans les années à venir. Est-il nécessaire de préciser que ce qui reste de la communauté TUS est plutôt sceptique quant au sérieux de ces annonces ?

UN JEU IMPARFAIT MAIS QUI VAUT LE DETOUR
Malgré ses quelques imperfections et l'arrêt de sa production par Spartan Games, The Uncharted Seas reste un excellent jeu de bataille navale fantastique. Bénéficiant de règles amusantes et de figurines de bonne qualité, il permettra aux joueurs de changer d'horizon alors que les règles d'escarmouches et grosses escarmouches terrestres se multiplient sur le marché des jeux avec figurines.
Le côté générique de ses listes d'armée et de ses figurines fait qu'il est parfaitement possible d'y jouer dans d'autres univers que celui, plutôt fade, que nous a proposé l'éditeur
.

    
 
ON AIME BIEN
ON AIME MOINS
  + Les règles de base simples et fun
+ Les figurines
- Les règles spéciales trop complexes
- Le manque d'âme de l'univers de jeu
- Le comportement de Spartan Games

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